Chine (début de notre ère)

Plus on remonte le temps, plus il est difficile de préciser le terme science. Nous commencerons par la Chine parce la transmission du savoir chinois semble moins fluide que la filiation Egypte ou Babylone vers la Grèce, des Grecs vers les Arabes, puis des Arabes vers l'Europe.


La "science chinoise" peut se définir en recherchant toute idée, invention ou méthode qui joue encore un rôle dans la science actuelle, ou alors en étudiant l'ensemble des traditions visant à interpréter ou à agir sur la nature. La première définition, en vertu du préjugé courant selon lequel tout savoir scientifique viendrait du monde européen inventeur de la méthode expérimentale et porteur de l'héritage grec, conduit souvent à présenter le savoir ancien comme un océan d'erreurs duquel émerge de temps à autre les brillantes anticipations de précurseurs géniaux. La seconde insiste sur les différences culturelles, religieuses et sociales de la Chine (la perspective "organiciste") face à l'Europe, l'Islam ou l'Inde. D'autre part, si certains objets nous renseignent sur l'activité mathématique des chinois, la Chine, contrairement à l'Europe, ne semble pas connaître de modification profonde de ses systèmes scientifiques et techniques à partir du XIV° siècle. Certains ont tenté d'interpréter ce "paradoxe" en identifiant des groupes sociaux responsables les uns de l'essor (rôle positif des ermites taoïstes centrés sur l'étude de la nature) et les autres du blocage (faiblesse de la classe marchande chinoise, rejet de certaines connaissances pratiques chez la classe dirigeante confucéenne, etc.). Pour d'autres, les causes du blocage seraient d'ordre intellectuel comme par exemple la faiblesse de la logique chinoise relative au manque de développement de la géométrie euclidienne. Mais ces explications n'emportent pas l'adhésion et peut-être faut-il s'interroger sur la pertinence du terme blocage, car il faudrait d'abord prouver que la Chine devait de toute nécessité s'engager sur la voie de notre modernité et qu'elle aurait échoué à y parvenir.

Dès le début de notre ère le théorème de Pythagore est connu. Le système positionnel n'existe en Chine que pour disposer les baguettes à calcul. Le zéro-cercle n'est attesté qu'au XIII° siècle, mais auparavant on ménage un espace vide pour indiquer les unités manquantes. Le "suanpan" - machine à calculer à boules - constitue une invention importante dès le XII° siècle de notre ère. Les mathématiques chinoises renferment des résultats intéressants et innovateurs : une bonne approximation de Pi, l'utilisation pratique des nombres négatifs, l'étude des carrés magiques, une méthode efficace des matrices pour résoudre des systèmes d'équations, la première esquisse dès le XIII° siècle de la méthode de Horner (début XIX° siècle), le développement du binôme illustré par le triangle de Pascal, l'utilisation de certaines séries, etc.

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