Islam (à partir de 800)

Et vous avez en ma personne le meilleur barbier de Bagdad, un médecin expérimenté, un chimiste très profond, un astrologue qui ne se trompe point, un grammairien achevé, un parfait rhétoricien, un logicien subtil, un mathématicien accompli dans la géométrie, dans l'arithmétique, dans l'astronomie et dans tous les raffinements de l'algèbre ; un historien qui sait l'histoire de tous les royaumes de l'Univers. Outre cela, je possède toutes les parties de la philosophie, j'ai dans ma mémoire toutes nos lois et toutes nos traditions, je suis poète, architecte... Ainsi s'exprime le barbier dans Les Mille et Une Nuits, véritable encyclopédie du savoir populaire dans laquelle l'algèbre figure avec ses raffinements. La popularité des mathématiques, leur diffusion et le rôle privilégié de l'algèbre sont donc des traits de ce que l'on appelle les mathématiques arabes.

 


 

Au début du IXe siècle à Bagdad, l'entreprise de traduction des mathématiques hellénistiques est à son apogée. Elles sont l'oeuvre de mathématiciens comme Thabit ibn Qurra (826-901) et suscitées par les besoins de la nouvelle société, en astronomie, en optique, en arithmétique, dans le domaine des instruments de mesure, etc. Cest à cette période, et dans ce milieu, celui de la Maison de la sagesse à Bagdad, que Muhammad ibn Musa al-Khwarizmi rédige Kitab al-jabr wa al-muqabala dans lequel al-jabr et al-muqabal désignent deux opérations, la première de transposition et la seconde de réduction, permettant de cerner linconnue - indifféremment appelée racine ou chose. Le but d'al-Khwarizmi est clair : élaborer une théorie des équations du second degré auxquelles peuvent être ramenés les problèmes arithmétiques et géométriques. C'est dans ces pages que surgit pour la première fois l'algèbre comme discipline mathématique distincte et indépendante.

 

L'événement est crucial et on entrevoit l'immense potentialité qui imprégnera les mathématiques à partir du IXe siècle : l'application des disciplines mathématiques les unes aux autres. Ainsi verront le jour l'algèbre des polynômes, l'analyse combinatoire, l'analyse numérique, la résolution numérique des équations, la nouvelle théorie élémentaire des nombres, la construction géométrique des équations. Dautres effets résulteront de ces multiples applications, comme la séparation de l'analyse diophantienne entière et de l'analyse diophantienne rationnelle, devenue un chapitre à part entière de l'algèbre sous le titre d'analyse indéterminée. Ibn Turk, sans rien ajouter de nouveau, reprend une discussion plus serrée de la preuve, et plus tard Thabit ibn Qurra, revient aux Éléments d'Euclide, à la fois pour établir les démonstrations d'al-Khwarizmi sur des bases géométriques plus solides et pour traduire géométriquement les équations du second degré. Ibn Qurra est dailleurs le premier à distinguer entre les deux méthodes algébrique et géométrique, dont il cherche à montrer quelles aboutissent toutes deux à l'interprétation géométrique des procédés algébriques.

 

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